l’art de réussir une vente en horlogerie

Dans ce métier, il faut de l’humilité et des connaissances qui ne se limitent pas à la seule culture horlogère. pour devenir un bon vendeur, il faut avoir de la sensibilité, une attirance pour la communication et le plaisir de partager.
beaucoup de qualités pour, au final, avoir le chic de trouver le déclic !

Il ne suffit pas d’aimer les montres pour bien les vendre. Au contraire, certains professionnels vont même jusqu’à dire que les bons vendeurs sont ceux qui en savent peu mais connaissent l’essentiel. On en viendrait presque à dire qu’un vendeur bavard et qui étale sa science est un danger potentiel dans une boutique dédiée à l’horlogerie. C’est un peu vrai car le risque est de voir la magie de la vente de déliter pour se transformer en un échange d’informations.

Savoir se montrer discret 
Un bon vendeur est, en premier lieu, un élément de la boutique qui doit se faire oublier. Attention, se faire oublier ne
veut pas dire être mal élevé au point de ne pas saluer le visiteur. Il est vrai que le simple fait de dire bonjour à un visiteur peut l’affoler, d’autant que dans les métiers de l’horlogerie joaillerie, les passants sont dans l’obligation de demander l’autorisation de rentrer dans la boutique et de passer un sas. Cette sensation d’être un peu pris au piège altère souvent leur jugement et un simple bonjour peut leur sembler la première base d’une tentative de vente. Le vendeur malin trouvera toujours les mots en fonction de l’attitude du visiteur. L’idée est de laisser le chaland exprimer par lui-même ses désirs. Le vendeur sait par expérience qu’un passant osant presser le
bouton de la sonnette n’est pas là par hasard. Même s’il n’a pas encore passé le cap de réaliser son achat, il représente déjà un prospect potentiellement attractif. Rien ne sert donc de brusquer les choses, il suffit d’attendre tout en s’affairant à d’autres tâches pour ne pas donner l’impression au visiteur qu’il dérange et qu’on attend de sa part qu’il se dépêche de formaliser sa demande.
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L’art de l’approche

Dans l’univers de la vente, on sait les hommes particulièrement fragiles, surtout lorsque la force de vente est une jeune femme qui sait jouer de ses atouts. Les femmes réussissent souvent dans les boutiques spécialisées, lors même que l’on s’attendrait à des messieurs doués pour la mécanique et capables de fournir une foule d’informations. Le but dans la vente est de convaincre, pas de faire montre de savoir. A ce jeu, les femmes sont plus douées. L’homme en boutique sera souvent l’horloger que l’on sondera pour avoir une information de détail. La vendeuse habile saura se mettre en retrait pour laisser parler le client et pour laisser s’exprimer une autorité supérieure, ce qui donnera plus de poids à sa propre capacité naturelle de persuasion. Vendre est un art complexe où la psychologie est essentielle.

En dire, mais sans trop
Combien de vendeurs en disent trop, au point même de finir par énoncer des erreurs ! La stratégie en matière de communication revient à entamer un discours non pas pour savoir ce que veut le client comme produit, mais pour commencer à échanger sur la base d’un vocabulaire incitant à l’empathie. Savoir à qui le vendeur s’adresse est important : cadre, profession libérale, retraité, enseignant, etc. L’idée est de planter le décor, le temps de se pencher sur le produit. Chacun trouvera les mots qui conviennent pour entamer une conversation afin de focaliser l’attention sur l’acheteur. Un client qui sent qu’on lui accorde de l’intérêt est toujours plus enclin à s’ouvrir et plus serein pour donner des informations qui devraient aider le marchand à trouver ce qu’il désire ou à répondre plus convenablement à ses attentes. Une fois la pièce en main, l’idée est de prendre le temps de l’observer, d’en discuter et surtout, de l’essayer. Idéalement, une boutique devrait posséder un espace un peu en retrait destiné à recevoir les clients qui souhaitent prendre ce temps de réflexion, le produit en main. Tous n’en disposent pas et certains propriétaires de boutiques se montrent même allergiques à l’idée d’installer une table pour découvrir en toute
quiétude les produits sélectionnés. Pour certains détaillants, la table entraîne nécessairement une perte de temps et ralentit l’acte d’achat. C’est vrai, mais cela augmente l’idée de convivialité et maximise le principe de luxe. Après, tout est question de choix. Les vitrines peuvent tenir lieu de supports sur lesquels les modèles sont posés. Certes, dans beaucoup de boutiques, les montres ne valent pas plus de 3000 euros, mais le prix importe moins que la façon dont on les vend. C’est aussi vrai que le temps passé pour placer une édition à 15 000 euros ne sera pas le même que celui accordé pour vendre une référence à moins de mille euros. Toutefois, il ne faut pas oublier que la notion de luxe est évolutive et dépend du portefeuille du client. Pas question de dénigrer ou de mépriser un consommateur dont le pouvoir d’achat est inférieur à ce que l’on aurait pu imaginer. En revanche, un client traité avec respect sera toujours un ambassadeur pour la maison qui l’aura servi convenablement.
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Savoir finir la transaction
Une fois que l’affaire est faite, que le passant s’est transformé comme par magie en client, la tension ne doit pour
autant pas retomber. L’acte d’achat est toujours une sorte de délivrance et il faut ensuite accompagner le client jusqu’à la réalisation, le paiement. L’affaire est cruciale et nécessite beaucoup d’attention pour que, dans un sursaut de lucidité, il ne se ravise pas. L’idée est de proposer à ce nouvel ami de la maison un traitement « VIP » : paquet cadeau même si le cadeau est pour lui, petit geste d’attention en lui proposant un rafraîchissement (le coût du service est essentiel même pour un produit à petit prix car cela fait la différence). On pense également à l’accompagnement en rappelant bien que la pièce acquise est tout à fait idéale, que le choix est le bon, etc. Evidemment, on ne laisse jamais en plan ce nouveau membre de la grande famille des contributeurs au fonctionnement de la Maison. On l’accompagne jusqu’au seuil du sas au moins, en lui indiquant qu’il sera toujours le bienvenu et qu’en cas de soucis, il aura toujours une oreille attentive sur place. Marteler l’idée d’un service sans faille car, au final, cette idée a son importance dans le prix. Et parce que la fin de la vente n’est véritable que lorsque le produit est défalqué des stocks, il faudra au vendeur consciencieux commander à nouveau le modèle en question pour qu’il ne soit pas démuni s’il venait à un autre client l’idée de vouloir le même.
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Par Vincent Daveau

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